Burkina Faso :« La musique burkinabè est en train de s’exporter», Dez Altino

Dez Altino, à l’état civil Tiga Wendwaoga Désiré Ouédraogo, dit le Prince national, fait partie des meilleurs artistes burkinabè de sa génération. Il a à son actif 6 albums. En 2013, l’artiste a été désigné Kundé d’or de l’année, le prestigieux trophée qui récompense depuis plusieurs années les artistes burkinabè et de l’extérieur. Comment se porte l’artiste ? Quelle est la suite de sa carrière ? Libreinfo l’a rencontré pour vous !

Interview réalisée par Rama Diallo et Nicolas Bazié

Libreinfo.net : Comment se porte la carrière de Dez ?

Dez Altino : Ma carrière musicale se porte bien. J’ai effectué quelques voyages, j’ai fait une tournée dans plus de quinze villes en Côte d’Ivoire en janvier.  Je suis rentré au pays fin janvier et j’ai commencé à préparer mon nouveau single. Je suis en train de préparer le clip entre Abidjan et Ouagadougou. Je suis rentré d’Abidjan le 7 mars. En fin d’année j’étais au palais de la culture d’Abidjan pour l’événement de l’humoriste ivoirien En K2K. J’y étais en tant qu’artiste invité.

Libreinfo.net : Vous avez parlé d’un single dont le clip sort bientôt. Est-ce qu’il y a un album en vue ?

Dez Altino : Un album en vue non, moi je ne prévois pas les albums. Mais déjà, beaucoup de titres qui sont en studio, à un certain moment, si j’ai envie de sortir un album je le ferai. Pour le moment, je n’ai pas de date précise pour faire sortir un album.

Libreinfo.net : Quels sont vos projets ? 

Dez Altino : Mon projet c’est de toujours travailler. Le projet d’un artiste c’est toujours travailler à valoriser la musique burkinabè, c’est notre plus grand projet.

Libreinfo.net : Quels sont vos rapports avec vos collègues artistes ?

Dez Altino : J’ai de très bons rapports avec mes collègues artistes. Je n’ai pas de problème avec un artiste. Un artiste n’a pas de problème avec moi. Donc je peux dire que les rapports sont bons.

Libreinfo.net: Comment voyez-vous la nouvelle génération d’artistes qui émerge ?

Dez Altino : Pour moi il n’y a pas de génération en musique, c’est une continuité. Il y a ceux qui ont commencé avant, depuis belle lurette la musique existe, et la musique reste la musique.  Il y a ceux qui ont commencé avant les autres mais qui sont toujours sur le terrain. On a par exemple le grand Alpha Blondy qui organise des grands concerts. C’est de faire de telle sorte à faire perdurer la carrière c’est ça le plus important.

Je félicite les nouveaux parce que beaucoup se sont démarqués et c’est très important. C’est ça aussi la musique, lorsque c’est une seule personne qui joue chaque fois, cela n’a pas de sens. Cela n’oblige pas à travailler davantage. Nous les encourageons, parce que le fait d’être là, avoir aussi des fans, c’est très important. Cela va motiver ceux qui vont venir. Parce que d’ici là il y en a d’autres qui vont venir. Aussi, cela motive ceux qui sont déjà là. C’est pour cela que je dis qu’en musique il n’y pas de génération.

Libreinfo.net : Quelles sont vos relations avec ces jeunes ? 

Dez Altino : J’ai de très bonnes relations avec ces jeunes. Beaucoup m’appellent tout le temps. Certains viennent me rendre visite. Kayawoto est venu me rendre visite la semaine dernière avec son producteur. D’autres m’écrivent. Je peux dire que ce sont des jeunes qui font toujours l’approche, qui cherchent toujours à comprendre. Je trouve que c’est très bien et c’est important.

Libreinfo.net : D’aucuns disent que la musique burkinabè a du mal à s’exporter. Et aussi sur la chaîne Trace TV on ne voit pas trop les clips burkinabè passer. Selon vous, qu’est-ce qui pourrait expliquer cela ? 

Dez Altino : Trace n’est pas une référence pour la musique internationale. Trace joue la musique qu’elle veut. J’ai des relations avec les travailleurs de Trace, on s’écrit, on se parle, je suis même allé là-bas plusieurs fois. Tous les grands artistes d’Europe n’ont pas eu Trace comme référence. Mais Trace fait la promotion de la musique africaine.

On peut peut-être dire qu’il y a d’autres avantages que les artistes burkinabè n’ont pas. Il y a par exemple Trace FM en Côte D’ivoire et la plupart des musiques jouées sur Trace FM sont jouées sur Trace Africa. Avant, il n’y en avait même pas.  Maintenant beaucoup d’artistes burkinabè passent sur Trace TV, BBlack, Télé sud. Maintenant la musique burkinabè est un peu jouée partout. Au Cameroun on joue de la musique burkinabè. C’est pour dire que la musique burkinabè est en train de s’exporter. Les choses sont en train d’être changées. Aujourd’hui, Dez, Floby, Imilo et d’autres artistes passent sur Trace TV. Je me dis que la musique ce n’est pas une course de vitesse. Les choses viennent toute seule.

Libreinfo.net : Est-ce qu’aujourd’hui vous avez pour projet d’organiser un spectacle hors du pays. Peut-être en Côte D’ivoire, au Cameroun ou dans un autre pays ?

Dez Altino : J’ai déjà organisé plusieurs concerts en Côte d’ivoire et j’ai encore des projets. Mais je trouve que c’est toujours mieux quand on est invité. Par exemple au Cameroun si ta musique est bien aimée et qu’on t’invite c’est encore meilleur. J’ai beaucoup de projets à l’extérieur je devrais jouer en live en 2020 avec Lady Ponce à canal Olympia à Paris. Mais à cause de la COVID-19, nous n’avons pas pu. On a tellement de projets. Mais les bons projets sont ceux qu’on a pu réaliser. Ceux dont on n’a pas encore réalisé on ne les appelle pas projet.

Libreinfo.net : A vous entendre on a l’impression que la musique burkinabè est déjà exportée. Et ceux qui pensent le contraire sont dans le faux ?

Dez Altino : Non, mais je pense qu’il y a déjà un pas même s’il reste beaucoup à faire. Souvent pour aller de l’avant il faut regarder le travail qui a déjà été fait. Je pense qu’exporter c’est trop dit mais il y a du travail qui a déjà été fait et qui se fait. Ce que les gens exigent n’est pas encore arrivé mais pour moi ça va venir avec le temps et je suis sûre.

Libreinfo.net : Quelles sont les difficultés que rencontre le showbiz burkinabè ?

Dez Altino : Comme dans tout travail, il y a des difficultés. Comme nous voulons, il faut exporter la musique burkinabè. Le showbiz de tous les pays d’Afrique a les mêmes difficultés. Quand on prend la Côte D’ivoire, il y a des milliers d’artistes mais combien sont exportés. Quand on prend le Cameroun c’est la même chose. Au Burkina, il y a de très bons artistes mais comme j’aime le dire, il faut rencontrer la bonne personne au bon moment et du coup ça fait de toi une star internationale.

Au Burkina, il manque des personnes qui puissent aider les artistes à exporter la musique. Mais les choses sont en train de s’arranger avec quelques personnes qui se démarquent.

Libreinfo.net : Doit-on dire qu’il n’y a pas de grosses maisons de production qui puissent aider les artistes à s’exporter?

Dez Altino : C’est ce que je dis. Est-ce qu’il y a de grosses maisons de productions au Burkina ? Il y a des producteurs mais il n’y a pas de grosses maisons de production. Je pense qu’après Seydoni production, il n’y a pas de grosses maisons de production. Mais je pense aussi que c’est l’esprit. Tout se passe dans la tête. Si l’esprit s’ouvre à cela et avec un peu d’accompagnement et un peu de chance, je pense que ça va aller. La musique est un esprit au fait, elle n’est pas seulement les moyens.

Libreinfo.net : Comment voyez-vous la musique burkinabè d’ici quelques années ? 

Dez Altino : Je ne peux pas prévoir mais je sais qu’il y aura les plus grandes stars de la musique d’Afrique au Burkina. Ça je suis sûre et certains. C’est en train de se dessiner, c’est tellement visible. Même si les gens ne le voient pas nous les artistes nous le voyons.

Libreinfo.net : Certains artistes burkinabè s’auto-produisent. Est-ce aussi votre cas ?

Dez Altino : Moi ma production, je l’ai fait pas parce que je voulais me produire, mais parce que je n’avais pas de producteur au début. Mais comme j’ai commencé et comme on aime le dire, l’appétit vient en mangeant, depuis le début, je suis mon propre producteur. Je n’ai pas eu de producteurs. J’ai eu des managers et des éditeurs mais je suis mon propre producteur. La production ce sont les moyens.

Quand tu as les moyens tu peux faire la production. Quelqu’un qui n’est pas dans le showbiz peut faire la production. Même si côté technique la personne va choisir quelqu’un pour la suivre. Actuellement je suis en train de préparer ma maison de production. C’est déjà prêt, j’attends le bon moment pour lancer la production. Je veux produire d’autres artistes burkinabè pour que la musique burkinabè continue de vivre.

Libreinfo.net : Est-ce que vous produisez déjà des artistes ?

Dez Altino : Pas encore, mais je soutiens certains. J’ai déjà produit gratuitement des artistes dans mon studio. J’ai également financé des sons dans d’autres studios, c’est ma façon d’apporter mon soutien et donner un coup de pouce à certains artistes. Je demande à tous les Burkinabè de suivre les artistes parce qu’on ne peut pas aimer quelqu’un qu’on ne suit pas. Actuellement ,il y a les liens sur YouTube,  Facebook, Instagram, Tik Tok et autres. Je pense que si aujourd’hui on connaît les Beyoncé, Shakira et les autres grands artistes des États-Unis, c’est grâce à internet.

Ici au Burkina, les gens ne savent pas partager, aimer et donner de la visibilité à l’artiste. Avant c’était la radio et la télévision. Aujourd’hui tout le monde peut contribuer à faire évoluer la musique d’un artiste. Ce sont les Burkinabè qui feront tout pour fabriquer leurs artistes. Quand tu es respecté dans ton pays quel que soit l’artiste étranger qui va venir, il te respectera également. Aussi, là où tu iras tu seras respecté. Nous avons besoin du soutien de tout le monde. Chaque artiste a besoin du soutien de ses fans et de son peuple.  Comme l’américain aime la musique américaine, comme le français aime la musique française, le Burkinabè doit aussi aimer la musique burkinabè.

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