Ceci est un communique du procureur du
Faso près le tribunal de grande instance Ouaga I sur le contentieux
entre la société générale de transit , le groupe AECI et la société Bulk
Mining Explosives (BME) sur le classement tarifaire du nitrate
d’ammonium.
Selon le procureur du Faso, Harouna Yoda, depuis la saisie pénale de
marchandise effectuée conformément aux articles 532-1, 534-1, 535-1 du
code de procédure pénale, des deux entreprises, des personnes se disant
expertes sécurité des personnes et des biens tentent de dénoncer la
saisie. Ces personnes soutiennent qu’elle est faite de nature à exposer
la sécurité des populations en raison de la nature dangereuse de la
marchandise.
Le procureur tiens à porter à la connaissance de l’opinion publique que
c’est sur la base de la sensibilité de la marchandise que le juge a
constitué le Directeur Général des Douanes en qualité de séquestre de la
marchandise. Il précise que la procédure judiciaire suivra son cours
normal nonobstant les lamentations sans fondement légal aucun émanant
tant de ces lobbies que de leurs commettants sur les réseaux sociaux.
Courant année 2013 , les services
des douanes ont constaté que deux(02) sociétés à savoir Burkina Mining
Compagny(BMC) et Bulk Mining Explosives (BME), toutes spécialisées dans
la production des explosifs pour les sociétés minières déclaraient le
nitrate d’ammonium qu’elles importaient à la position tarifaire 3102 qui
est celle de l’engrais destiné à la fertilisation des sols pour
l’agriculture au taux cumulé de 3,5 % de droits et taxes de douanes au
lieu de la position 3602 (nitrate d’ammonium contenant des substances
explosives) au taux de 36 %. Le nitrate d’ammonium importé au Burkina
Faso est contenu dans des emballages estampiés ONU UN 1942, et est
classé comme produit dangereux en matière de transport. Les
spécifications techniques montrent que ce produit contient au moins 0,2%
de matière combustibles donc exclu du chapitre 31 (engrais) de la
nomenclature tarifaire de l’Organisation Mondiale des Douane.
La douane estimait que le classement du nitrate d’ammonium destiné à
fabriquer des explosifs pour les sociétes minières comme une substance
destinée à la fertilisation des sols n’était qu’une manœuvre pour
profiter de la Loi N°041-2010/AN du 02 décembre 2010 portant loi des
finances pour l’exécution du budget de l’Etat, gestion l’exercice 2011
qui exonère les engrais (chapitre 31 du tarif des douanes) de la Taxe
sur la Valeur Ajoutée (TVA). En se fondant sur les règles Générales
Interprétatives du système Harmonisé et la description technique du
nitrate d’ammonium importé à des fins de production d’explosif, le
service des douanes avait dressé deux (02) procès-verbaux à cette époque
pour constater l’existence d’une fausse déclaration d’espèce tarifaire
et un manque à gagner pour le Trésor Public. Les deux sociétés suscitées
ont par la voix de leur déclarant à savoir le groupe Bolloré(SDV) et la
Société Générale de Transit Burkina (SOGETRA) a refusé la
reconnaissance du service.
En 2015 pendant que le contentieux était en cours, la société
African Explosives Limited ( AEL) filiale du groupe AECI qui déclarait
ses importations de nitrate d’ammonium en provenance de la Russie et de
la Suède avec des Autorisations Spéciales d’Importation et des
Déclarations Préalables d’Importation (DPI) a déclassé son produit de la
position 3602 à la position 3102. Elle importait désormais sans
Autorisation Spéciale d’Importation et déclarait le nitrate d’ammonium
comme de l’urée destiné à l’agriculture. Un procès-verbal fut également
dressé par le service des douanes et la société AEL par la voie de son
déclarant SOGETRA a refusé également la reconnaissance du service.
Toujours courant 2015, la société MAXAM abandonnait aussi la
position 3602 au profit de la position 3102 pour toutes ses importations
de nitrate d’ammonium.
En juillet 2015, le Directeur Général a pris une note de service
instruisant ses services de percevoir la TVA sur les importations du
nitrate d’ammonium car l’importation de ces produits ne bénéficiaient
pas de la loi N° 041 de 2010. Le comité technique du système Harmonisé
(SH) de la Direction de la Législation et de la Règlementation de la DGD
a avait été saisi par le bureau des douanes de Ouaga Route pour
départager les différents protagonistes.
Au regard des enjeux pour chaque partie, notamment le volume des
recettes que perdait le budget de l’état et l’équivalent que les
sociétés importatrices du nitrate d’ammonium devaient payer d’une part
et dans un souci de transparence, d’équité et d’indépendance d’autre
part, le comité technique du SH de la DGD a porté le dossier auprès du
comité du SH de l’Organisation Mondiale des Douanes (OMD) à Bruxelles.
Ce comité au cours de sa 59 -ème et 60 -ème session de 2017 a délibéré
sur le classement du nitrate d’ammonium en retenant la position 3602
comme étant l’espèce tarifaire du nitrate d’ammonium destiné à la
fabrication des explosifs. A l’issue de la décision de classement de
l’OMD qui a conforté l’Administration des Douanes du Burkina Faso dans
sa position, le Directeur Général des douanes a invité toutes les
sociétés concernées par ce litige le 24 novembre 2017 pour d’abord les
mettre au courant de la décision de l’OMD et faire aussi le point de ce
que chacune d’elle doit au budget de l’Etat. Elles ont toutes été
invitées à déclarer le nitrate d’ammonium à la position 3602 et c’est la
pratique depuis fin 2017.
Le tableau récapitulatif suivant a été présenté :
Déclarants Sociétés Importations( poids net en tonne) Valeur en francs CFA Droits et taxes éludés
SDV(BOLLORE) BMC 1 208,493/615 429 116/137 438 976.
SOGETRA BME 3 416,477/1 614 523 370/ 351 780 828.
AEL 22 920/7 954 826 788/1 653 080 747.
NTB MAXAM 8 915,6/2 445 485 168/190 000 977.
Les sociétés MAXAM et BMC par leur
déclarant NTB et BOLLORE se sont soumis à la décision de l’OMD en
s’acquittant des droits et taxes éludés avec paiement d’amendes. Les
représentants d’AEL et de BME en présence de leur déclarant ont
manifesté d’abord leur désapprobation au vu du montant de droits et
taxes éludés qui n’est autre que la conséquence de leur refus du
classement proposé par l’administration des douanes en 2013 et 2015.
Elles ont par la suite tenté un règlement transactionnel en s’approchant
de l’Administration des douanes avec des propositions fantaisistes qui
n’ont pas prospéré.
Le groupe AECI et la société BME qui ont refusé d’assumer les
conséquences de la décision de l’OMD se sont mis dans le dilatoire pour
occulter les intérêts du Trésor public alors que l’avis de classement a
été une demande expresse de l’Administration des Douanes Burkinabè pour
mettre fin au litige qui l’opposait aux sociétés importatrices du
nitrate d’ammonium et préserver les intérêts de l’Etat.
La DGD, en raison de l’absence de transaction, a saisi conformément à
la procédure douanière mon parquet de trois (03) procès-verbaux
concernant les sociétés AEL et BME. Outre l’infraction de fausse
déclaration d’espèce tarifaire, j’ai relevé sur la base des documents
fournis, les infractions de faux et usage de faux en écriture privée, de
blanchiment de capitaux. J’ai alors saisi la Division de la Police
Economique et Financière (DPEF) en vue d’une enquête criminelle
complémentaire et une enquête patrimoniale. Les renseignements découlant
de l’enquête ont abouti à la saisine du Président du Tribunal d’une
requête aux fins de saisie pénale effective des comptes bancaires de la
SOGETRA ainsi que de ses deux clients AEL et BME. Outre cela les biens
mobiliers notamment des véhicules appartenant aux trois sociétés ainsi
que quatorze (14) camions et neuf (9) camions chargés de nitrate
d’ammonium ANPP et ANE appartenant respectivement à AEL et BME ont été
saisies sur la base de l’ordonnance du Président du Tribunal.
Il m’a été donné de constater que depuis cette saisie pénale de
marchandise effectuée conformément aux articles 532-1, 534-1, 535-1 du
code de procédure pénale, des personnes s’improvisant expertes sécurité
des personnes et des biens sur fond d’intimidations s’analysant en des
actes d’obstruction à la justice tentent de dénoncer la saisie en
soutenant qu’elle est faite de nature à exposer la sécurité des
populations en raison de la nature dangereuse de la marchandise. Sachant
que ces interpellations inopportunes émanent assurément de personnes
intéressées par la procédure, je tiens à porter à la connaissance de
l’opinion publique que c’est sur la base de la sensibilité de la
marchandise que le juge a constitué le Directeur Général des Douanes en
qualité de séquestre de la marchandise. Bien au contraire, ce sont ces
genres interpellations qui promeuvent l’insécurité en ce sens qu’elles
visent à cristalliser l’attention de personnes mal intentionnées sur la
marchandise. En tout état de cause, la procédure judiciaire suivra donc
son cours normal nonobstant les lamentations sans fondement légal aucun
émanant tant de ces lobbies que de leurs commettants sur les réseaux
sociaux. Sous réserve d’une transaction qui peut intervenir légalement
entre l’administration douanière et les contrevenants, j’exercerai donc
bientôt les poursuites pénales appropriées contre les sociétés SOGETRA,
AEL et BME ainsi que leurs représentants légaux et préposés dont les
actions, aux antipodes de la légalité, ont concouru à la consommation
des infractions relevées.
Bonne fête de l’indépendance à tous et à toutes !
Le Procureur du Faso
Harouna YODA